30 mai 2006

L'éducation citoyenne : Un portail vers l'universel

« J'assemble un chassis de voiture. Je transvide 16 grammes de plomb dans le mélange. Je remplis le rapport financier en respectant telle ou telle norme comptable. Je travaille, je produits, je rapporte. Mais je suis payé, et ça me contente. »

Et si ces choses comportaient des conséquences portant dans un autre plan que celui du porte-feuilles? Une autre dimension, la dimension du long-terme, du planétaire.

« Je travaille en honnête humain. Je paie mes taxes et je ne vole pas l'argent que je gagne. »

Certes, comment reprocher quoi que ce soit au travailleur? Mais pourtant, ne serait-il pas bon que le comptable s'informe si le rapport financier qu'il produit est pour une firme honnête? Et ces grammes de plomb dans les usines, où vont-ils après l'usage? Et puis d'où viennent les pièces qui sont assemblées au chassis des voitures?

Si l'éducation citoyenne peut donner des outils aux travailleurs de manière à ce qu'ils soient conscientisés (où aient l'ouverture d'esprit pour le devenir), alors ne serais-ce pas une raison pertinente de l'enseigner?


Le rappel à l'ordre des actionnaires

Des fois il vaut mieux écrire dans le désordre que d'asphyxier la pensée en son état le plus larvaire. Cette entrée en est le résultat.

Il m'apparaît, après le visionnement du film « The Corporation », qu'une sorte de « couche d'abstration » empêche les actionnaires de garder à l'esprit les conséquences de leurs investissements. Trop d'humains participent au commerce mondial pour que ceux-ci soient tous dénués de la moindre compréhension du concept de « bien commun ». Imaginez si ceux-ci devaient regarder avant chaque achat un court vidéo expliquant les conséquences de l'entreprise en question sur notre monde.

Certes cela n'arrivera probablement jamais, mais la question reste viable : serait-il possible de faire confiance à l'humain pour qu'il cesse d'encourager les plus menacantes des entreprises humaines? Rappeller à l'humain les conséquences de ses actes nous amènerait à influencer l'agir à la source.

Encore un exemple du parasitisme évident que la pratique de la vie moderne taxe à notre pensée.


28 mai 2006

Bièrophagie éhontée en sol français

Tant d'eau a passé sous les ponts depuis que j'ai mis le pied dans mon Blogue! Ce temps qui me sépare de la période fertile est équivalent à celui qui me sépare de ma visite en France.

En guise de retour aux sources (et quelles sources!) permettez moi de vous présenter un ouvrage à gorge déployée tel que vous n'en avez probablement pas vu souvent dans vos vies! Sur 9 semaines moi et des amis avons exploré plus que seulement les attraits visuels de la France, nous avons aussi et surtout profité des plaisirs gustatifs et gazéifiés que nous avons rencontré! Voici la liste des 103 bières (!) goûtées et duement notées tout au long du voyage :
  1. 8,0 Premium, Starkbier S.B.V. (8%)
  2. 9X, Lager Extra Forte (8.4%)
  3. Abbaye de Oudkerken (6.2%)
  4. Adelscott, Au Malt et Aromatisée au Whisky (5.8%)
  5. Amstel Blonde, France (5%)
  6. Amsterdam MAXIMATOR (11.6%)
  7. Amsterdam NAVIGATOR (10%)
  8. ASAHI, Super Dry (5%)
  9. Atlas (7.2%)
  10. Baltika 3 (4.8%)
  11. Baltika 5 (5.3%)
  12. Baltika 7 (5.4%)
  13. Bavaria 8·6 (7.9%)
  14. Bavaria Lieshout Holland (5%)
  15. Beamish Red Stout (4.2%)
  16. Beamish, Irish Stout, Noire (4%)
  17. Belle Brasseuse, Lager (4.2%)
  18. Belzebuth Haute Fermentation (8.8%)
  19. Bergadler Premium Pils, Lidl (4.9%)
  20. Bierataise Blanche (6%)
  21. Bierataise Brune
  22. Blanche des Neiges, Witbier (5%)
  23. Blonde "33" Export (4.5%)
  24. Blonderbräu Pils (4.6%)
  25. Brauburger (4.5%)
  26. Brugs, Blanche de Bruges (4.8%)
  27. Buckler, Blonde Aromatisée (Sans Alcool)
  28. Bush, Duboisson, Belgique (12%)
  29. Carlsberg, Coppenhague Danemark (5%)
  30. Casino Panaché (1%)
  31. Chimay Bleue, Pères Trapistes (9%)
  32. Chimay Rouge, Pères Trapistes (7%)
  33. Ch'Ti Ambrée, Bière de Garde (5.9%)
  34. CREST Super Lager (8.4%)
  35. Desperados MAS, Aromatisée Tequila Lime (3%)
  36. Desperados, Aromatisée à la Tequila (5.9%)
  37. Edelweiss, Blanche Aromatisée (5%)
  38. EKU 28 (11%)
  39. EKU Pils (4.9%)
  40. Eristoff Ice Lemon (5%)
  41. Faro Lambic Lindenmans (4%)
  42. Finkbräu, Lager Blonde, Lidl (4.5%)
  43. Fischer Doreleï, Ambrée d'Alsace (6.3%)
  44. Fischer Tradition, Blonde d'Alsace (6%)
  45. Fischer, Bière de Noël (6%)
  46. Foster's, Blonde (5%)
  47. Gavroche, Flandre, Brasserie Saint-Sylvestre, Sur Lie (8.5%)
  48. George Killians, Rousse (6.5%)
  49. Gold, La Bière OR de Maître Kanter (6.1%)
  50. Goudale, Blonde, Bière de Garde (7.2%)
  51. Grafen Walden, Pils Blonde, (4.9%)
  52. Grimbergen, Blonde (6.7%)
  53. Guinness, Special Export Stout (8%)
  54. Het Kapittel Watou (Bière du Curé) (6.5%)
  55. Hoegaarden, Blanche (4.9%)
  56. Jenlain Ambrée (7.5%)
  57. Jenlain Blonde, France (7.5%)
  58. Jenlain SIX, Blonde (6%)
  59. Kanterbräu Blonde (4.2%)
  60. Karland Ambrée (6%)
  61. Karlsbräu (5%)
  62. Kellegen, Blonde (4.2%)
  63. Koeningsbier, Blonde de France (4.2%)
  64. Kriska (5%)
  65. Kronenbourg 1664 (5.5%)
  66. Kronenbourg Blonde (4.2%)
  67. Kronenbourg Fizz (5%)
  68. Kronenbourg Pur Malt (Sans Alcool)
  69. Kwak, Belgique, Haute Fermentation (8%)
  70. La Bécasse aux Cerises, Lambic Kriek (5.3%)
  71. Lager PREMIUM Carefour (4.7%)
  72. L'Angelus Bière de Froment (7%)
  73. Leffe Blonde (6.6%)
  74. Leffe Tripel, Belgisch Bier (8.5%)
  75. Leroy Yperman (5.5%)
  76. Lidl Panaché (1%)
  77. Lindemans Cassis Lambic (4%)
  78. Oberpils, Blonde (4.6%)
  79. Old Lager Mützig (6.9%)
  80. Ottweiler Pils (4.6%)
  81. Pelforth Blonde (5.8%)
  82. Pelforth Brune (6.5%)
  83. Peroni, Nastro Azzurro (5.1%)
  84. Pietra, Biera Corsa, Ambrée (6%)
  85. Pilsner Urquell, République Tchèque (4.4%)
  86. Pink Killer, Aromatisée au Pamplemousse (5%)
  87. Red Bavaria (7.9%)
  88. Reflets de France : Bière Blonde de Garde du Nord (6%)
  89. Reflets de France : Bière Blonde sur Lie d'Alsace (6.8%)
  90. Rodenbach (5.1%)
  91. San Miguel Especial (5.4%)
  92. Silly Saison, Silly Brouwerij (5%)
  93. Special Tireuse (unique au bar La Tireuse)
  94. Spéciale Flag, Maroc (5.2%)
  95. St-Omer Brune
  96. St-Omer Rousse
  97. Tourtel, Blonde (Sans Alcool)
  98. Tsingtao (4.5%)
  99. Valstar (3.7%)
  100. Van Pur Blonde (8.3%)
  101. Van Pur Blonde (4.3%)
  102. Wittekerke Wheat Ale, Blanche (5%)
  103. X-mas (servie à La Tireuse)
Mince, mais ça en fait des bières! Non point un saoulon puis-je clâmer être, car en maints pays plus grands buveurs de la dite liqueur il y a pour sûr, hey oui! Mais voilà il me faut vous dire : je pâlis lorsque je vois la faramineuse (et fort délicieuse) collection qu'a rassemblé Emmanuel Gillard : 3307! ...mais j'ai beau chercher, je n'ai pas encore trouvé le détenteur du record du monde...


15 mai 2006

Le temps perdu...

Le temps perdu
(Jacques Prévert)

Devant la porte de l'usine
le travailleur sudain s'arrète
le beau temps l'a tiré par la veste
et comme il se retourne
et regarde le soleil
tout rouge tout rond
souriant dans son ciel de plomb
il cligne de l'oeil
familièrement
Dis donc camarade Soleil
tu ne trouves pas
que c'est plutôt con
de donner une journée pareille
à un patron?


11 mai 2006

Adieu Toulouse!

Voici le grand jour! Depuis le début, je composais ce blogue en plein coeur de la merveilleuse ville de Toulouse en France, et aujourd'hui se termine mon stage ici, et je dois partir.


Ce soir 22h35 je quitterai la gare ferroviaire de Matabiau en direction de celle d'Austerlitz. L'arrivée à Paris se fera vers 6h23 (AM). Ensuite il faudra dire adieu à la France toute entière lorsque l'avion, en un beau Samedi de Mai, s'envolera vers le Québec.


10 mai 2006

I am not Canadian

Voici une courte chanson humoristique pour vous divertir. Vous pouvez la télécharger en toute légalité et lire les paroles en même temps (dans le cas où vous ne comprendriez pas tout rien qu'à l'oreille, ce qui est mon cas).

I am not Canadian
(Uncle Vince (Pete Cugno) sur la Radio Edge 102)

I'm not unemployed, or smuggling cigarettes across the border.
I don't eat Pepsi and Mae Wests for breakfast.
I don't watch the hockey game doin' it doggy style.
And non, I don't know Claude, Manon or François in Abitibi-Témiscamingue;
but I'm sure dey all 'ave nice teeth.
I smoke in church.
I speak Québécois and Joual; not French or Hanglish [sic];
and I pronounce it 'turd', not 'third'.
And eating french fries with cheese makes sense, mon esti;
I believe in distinct society – as long as someone else pays for it.
I believe in language police, not equal rights.
And, calice, I believe that "Club Super Sexe" is an appropriate place for my wife and me to celebrate our anniversaire!
What da hell, she goes on at ten, anyway!
In Québec, the Stanley Cup actually comes round more often than Halley's Comet.
I can get beer at the dépanneur, not at the convenience store.
And maybe I can't turn right on a red light, but, tabarnac, I can go right through it!
Because Québec is the world's largest producer of maple syrup, the 'ome of Céline Dion and Roch Voisine;
The land where everybody is shackin' up, and the legal drinking age is just a suggestion.
Je m'appelle Guy - and h'I [sic] h'am [sic] not Canadian. (Mautadit tabarnac esti...)

Merci salut la visite!


05 mai 2006

Est-il pertinent d'éduquer à la citoyenneté?

Voici le point de départ du dossier qui sera couvert dans les semaines à venir. Tous les crédits vont à Sylvie Lavoie et Jacques Laberge pour la rédaction des concepts et de la question. Stéphanie Déziel est celle qui m'a contacté depuis le début et c'est elle qui a rédigé le document qui servira à orienter le débat. Tous trois sont enseignants en Philosophie au Cégep de La Pocatière, et il est aussi très plaisant de discuter avec eux.

La question du débat :

Est-il pertinent d'éduquer à la citoyenneté?
 
Définition des concepts :

Pertinent :
Dans l'idée de souhaitable, opportun, désirable.
 
Éduquer :
Le fait de former quelqu'un, de l'élever à un niveau jugé souhaitable par la mise en oeuvre de moyens nécessaires.
 
Citoyenneté :
Le fait de posséder la statut de citoyen, c'est-à-dire d'être à la fois législateur des lois où on habite par les représentants qu'on élit et sujet de ces mêmes lois.

La pleine reconnaissance du statut de citoyen suppose:
  • des droits juridiques et politiques dans une perspective d'intégration.
  • des devoirs politiques et moraux dans une perspective de recherche du bien commun.
Pistes de questionnement :

En fin de compte, le débat tourne autour de la nécessité de former les jeunes à être des citoyens responsables et lucides (surtout devant le constat évident du désintérêt des jeunes pour la politique et pour les causes sociales).  Donc de leur montrer l'importance de contribuer à l'essor de la communauté et d'assurer la qualité de vie de la cité en contribuant au bien commun.

Est-ce le rôle de l'école d'intéresser les jeunes à la chose publique? Peut-elle vraiment le faire ou est-ce le rôle de la famille?  Quel type de citoyens elle doit former et comment?  Comment socialiser ces jeunes, les rendre des citoyens sans les endoctriner, leur imposer des valeurs jugées bonnes par l'ensemble de la société?


04 mai 2006

Un regard sur la chasse



« Les hommes sont les seuls chasseurs qui tuent lorsqu'ils n'ont pas faim. » - Steven Spielberg

« L'unique certitude de l'existence est qu'elle ne se renouvelle pas et qu'en marchant vers l'horizon on marche vers la mort... » - Maurice Gagnon


Les actions du Canada en matière d'environnement, un futur incertain

Le dernier budget fédéral du gouvernement conservateur ne fait vraiment rien pour rassurer les environnementalistes. Steven Guilbault, représentant Greenpeace-Québec, a récemment dénoncé l'orientation canadienne en ce domaine :

« On ne parle pas de Kyoto, on ne parle pas des changements climatiques, on a aboli le programme fédéral pour les énergies renouvelables, notamment pour l'éolien, ce qui est une très mauvaise nouvelle pour des provinces comme le Québec qui misait beaucoup sur [ce secteur]. »

Ce genre de décisions politiques rappelle celles prises par l'administration républicaine aux États-Unis à l'arrivée de George W. Bush. D'ailleurs autant Greenpeace que le National Environmental Trust dénoncent l'attitude du cabinet Harper à ce sujet. Est-ce que les investissements dans le transport en commun faits lors du budget peuvent compenser pour le laxisme quasi-unilatéral de l'état canadien en environnement? Je ne crois pas.



D'ailleurs, un mois plus tôt, un communiqué annonçait déjà des coupures majeures en environnement, ainsi que l'abolition de 15 programmes visant à combattre les changements climatiques
(source : Radio Canada) :

« Environnement Canada et le ministère des Ressources naturelles affirment qu'un nouveau plan « spécifiquement canadien » sera annoncé pour lutter contre les changements climatiques. 
 
Les autorités fédérales ont soutenu par communiqué qu'il fallait aborder les changements climatiques de manière efficace et réaliste pour le Canada, tout en assurant la vitalité de l'économie du pays. 
 
Parmi les programmes abolis, on retrouve notamment le fameux défi d'une tonne, qui incitait les Canadiens à réduire de 20 % leurs émissions de gaz à effet de serre.  

Ottawa met aussi un terme au projet pilote fournissant aux entreprises des incitatifs financiers pour réduire, notamment, les émissions de méthane des sites d'enfouissement. Le programme visant à faire des recherches sur la plantation d'arbres à croissance rapide pour réduire les gaz à effet de serre disparaîtra également. »

Il y a quelques semaines le gouvernement du Québec, administré par le Parti Libéral du Québec (PLQ), était critiqué sur le même sujet et pour des raisons semblables. Plusieurs groupes écologistes lui avaient ensemble envoyé 40 constats d'infraction en regard des méthodes (ou du manque de méthodes) employées par celui-ci.


03 mai 2006

Le malheureux destin de la planète des humains

Aujourd'hui encore, c'est en lisant les nouvelles que j'apprends une sombre nouvelle au sujet de la nature :

L'ours polaire et l'hippopotame viennent d'être ajoutés à la liste des espèces vulnérables selon l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (version anglaise). Le nombre d'espèces menacées connues atteint maintenant le nombre de 16 119, et celui des espèces éteintes celui de 784. La liste complète pourra être consultée demain Jeudi le 4 Mai, jour de la sortie des nouvelles données.



Mais où sont les bonnes nouvelles en ce qui concerne la terre?

Récemment encore je lisais que le gouvernement conservateur ne faisait pas grand chose en environement pour ralentir le réchauffement de la planète. Plus encore, il désire ratifier le protocole allégé que les États-Unis et plusieurs autres puissances de l'Asie-Pacifique (« l'Australie, l'Inde, le Japon, la Chine et la Corée du Sud ») on mis en place. Déjà que Kyoto était considéré conservateur à l'époque par les scientifiques et les environnementalistes, peut-on croire que celui là fera quoi que ce soit s' il n'oblige en rien ses signataires?

Cela n'a rien pour encourager notre ami l'ours, car ces deux nouvelles l'impliquent directement, et si les prédictions se révèlent vraies on devrait voir une baisse d'au moins 30% de la population d'ici 45 ans. Mais pourquoi le Canada serait-il forcé d'agir, voyons! Nous ne somme, après tout, pas responsables que le nord fonde, non? Balivernes, foutaise et calembredaine! Si un pays se réclame d'un territoire il doit en assurer la responsabilité et travailler à le préserver, et le pôle est en majeure partie sur notre territoire (et par « notre » j'inclus volontiers le Québec, car l'espèce a aussi élu domicile chez nous ).


Que faudra-t-il pour faire comprendre aux états que la valeur de ce qui est dans la nature, contrairement à la valeur des biens, ne pourra jamais calculée de manière juste avec de simples unités monétaires?


02 mai 2006

Notre vie versus l'universel

Nous passons tous une majeure partie de notre vie (plus ou moins) confortablement installés dans notre perspective de vie humaine. Nous travaillons, étudions, cherchons l'âme soeur, allons en vacances, dépensons de l'argent pour diverses raisons, etc. Ces activités recouvrent tout notre horizon intellectuel ou presque. C'est apparemment normal pour nous, en fait c'est un peu notre mode de vie, et c'est par cette fenêtre que nous voyons la vie. Cette minuscule fenêtre de l'existence...

De rares fois, un événement nous amène à porter un regard différent sur nos existences, nous faisant sortir de notre fenêtre jusqu'à ce qu'on puisse voir le monde extérieur. Ce peut être pendant un moment particulier passé à regarder les étoiles, pendant une émission scientifique, après un événement difficile ou une période de questionnement. Peut importe le mécanisme qui nous ouvre la voie, nous sommes toujours transportés comme en altitude au dessus de nos vies, prêts à relativiser.

Et puis l'on retombe.

Notre montre sonne l'heure, il se fait tard, il faut rentrer. Une pause publicitaire de détergent à linge interromps nos divagations. Le travail nous ramène à d'autres soucis et à d'autres questions plus urgentes.

C'est une étrange dichotomie qui sépare nos vies. D'un côté nous sommes des humains aux vies pratiques et concrètes. Même la majorité de nos activités mentales les plus complexes ne nous obligent pas à sortir du cadre de nos existences propres. Et d'un autre côté nous avons l'incroyable capacité de sortir de ce cadre et d'observer les choses plus globalement, plus universellement.

Que sommes-nous? Des humains, mais encore? Nous sommes des animaux, des vivants, des amas d'atomes soudés en molécules et assemblés si brillamment que nous sommes capables de nous déplacer, de voir, de penser, de lire. Nous sommes complexes. Plus complexes que tout ce que nous n'avons jamais fait de nos mains. Et nous ne sommes pas seuls : il y en a d'autres comme nous. Certes pas capables de naviguer l'Internet, mais capables de faire des choses que même cet orgueilleux humain n'est pas capable. Ils peuplent l'Antarctique, les abysses des océans, les jungles d'Amérique du Sud et d'Afrique. Ils se propagent dans le désert de Gobi et dans le Sahara, au coeur de la Cordillère des Andes et de l'Himalaya. Plusieurs vivent dans un équilibre fragile, dépendant d'interrelations complexes pour subsister, et d'autres sont comme des objets dans nos mains, de véritables usines à fabriquer ce que nous avons « besoin ».

Et de quoi avons nous besoin? De manger, de dormir, mais aussi de s'abriter parce que nos corps sont mous et fragiles et que sans protection nous mourrons facilement. Pourquoi remplir ces besoins? Pour se reproduire, procréer, poursuivre la chaîne. Nous sommes des vivants en premier, et nous perpétuer est notre fonction première. Mais certes, une fonction peut-être un « but » en soi, mais est-elle le seul but?

Je disais plus haut que nos vies étaient « concrètes » : nous faisons ce que nous croyons utile, ou nécessaire. Donc nous agissons! Mais est-ce que nos agirs mènent vers un but? Est-ce que la nécessité est le but que nous remplissons? Et puis quelle est cette nécessité après tout? Le travail, les études, la famille et les obligations que ces systèmes sous tendent. Mais nous les avons créées! L'humain passe-t-il alors tout son temps à remplir des obligations fabriquées de ses mains? Peut-être.

L'humain est un animal. Les systèmes sont le résultat d'une gestion des besoins humains transformée en but-en-soi. La nutrition, le repos, la protection (habillement et abri), la reproduction, ce sont toutes des fonctions animales qui sont reprises à divers niveaux dans l'ensemble des systèmes. Et puis d'autres « besoins » s'y sont greffés : s'informer, se distraire, socialiser, etc. Ils ne sont pas complètement nouveaux, juste des dérivés de la survie humaine, elle-même essentiellement animale. Mais au fur et à mesure que l'on diverge de ce qu'est l'humain, à mesure que l'on abstrait la nature de l'homme, on perd un peu de ce que nous sommes pour devenir quelque chose de différent.

Ne pas voir en mon discours une pure critique de ce que nous sommes devenus. Certes il y a matière à critique – et quelle profusion de matière! – mais les changements qui se sont opérés dans la société humaine au cours des siècles sont loin d'être tous mauvais. Si nous étions restés des « bêtes » (j'emploie ici sciemment un terme connoté) nous n'aurions jamais pu comprendre autant le monde dans lequel on vit. Il est toutefois ironique qu'avec autant de connaissance nous en sommes restés avec comparativement si peu de perspective sur l'univers. Et nous sommes tous coupables d'avoir attaché des oeillères sur nos têtes, quelle qu'en soi la raison.

Il faut choisir sa perspective sur le monde comme l'on choisi une fenêtre. Pour éviter qu'on étouffe, il faut pouvoir l'ouvrir.