02 mars 2009

Vigilance critique

Il ne faut pas baisser la garde car rien n'est acquis. Il se trompe celui qui croit que l'existence par le passé de « critiques de la société » est garante pour le futur d'une soi-disant « immunité » historiquement acquise envers l'exploitation intellectuelle et morale de nos faiblesses communes et connues.

Sans offenser quiconque : on ne peut pas faire l'économie de dire que l'homme est bêtement oublieux, au sens qu'il n'est pas capable de regarder en avant et en arrière à la fois, et qu'à force de projeter en avant des fictions on fait oublier au gens la réalité qu'il y a derrière. Le programme de la culture générale est le programme de la suite de l'Histoire humaine, et le refus de son atomisation anomique.

L'obstacle majeur est la quantité d'information critique qu'il faudrait inculquer aux humains pour les prémunir contre leur exploitation intellectuelle inévitable. Or il n'y a pas assez d'une vie pour que quelqu'un s'y consacrant à temps plein puisse en savoir assez pour se défendre contre la totalité corrosive de la bêtise humaine.

Il y a par contre de l'espoir dans la solidarité humaine qui, chassant les affres d'une jungle artificielle, réussirait à créer un climat propice à une juste et raisonnable émancipation autant corporelle qu'intellectuelle. L'idée n'est pas ici de tout politiser, mais de sévir contre les pollueurs de l'espace public qui menacent la survie de l'écosystème existentiel des humains.


Poker

Nous surtravaillons afin de surconsommer afin de faire grimper le PIB, et de permettre à de grands enfants naïfs et méchants, de jouer au poker avec des millions de tonnes de ressources naturelles, avec des milliards d'heures de vies humaines, avec des milliers d'œuvres d'art, d'universités, de médias, d'inventions, de chercheurs, de croyances, de confiances et de dons. Telle est la bourse en son for intérieur, car sous couvert de faire fructifier le taux d'intérêt transcendantalisé de la haute finance, elle fait de la course à la survie une course de chevaux, faisant de nous tous des bêtes de sommes, soumises aux impératifs de la compétition sportive des gamers du marketplace. Les produits financiers toujours nouveaux sont autant d'objets magiques pour la pensée magique des investisseurs qui fantasment dans l'univers fantastique que leur offre l'illusion de l'avoir face à la réalité de la mortification du monde. Les poubelles de leur lan-party de Wallstreet : des milliards de tonnes de cannes de cokes et de sacs de chips de geeks, jetées outre-mer, « loin des yeux loin du coeur ».

Alors que l'on redistribue la culpabilité, qu'on importe dans les auges-porcherie de nos supermarchés des infinités de gu-gus et de gri-gri insignifiants, on exporte des tonnes de fange, de meurtres et de misère. Si l'occident avait encore foi en quoi que ce soit, c'est au mépris de la précarité des uns qu'elle a sacralisé l'enrichissement funeste des autres.